Les droits du conjoint survivant
Les lois du 3 décembre 2001 et 23 juin 2007 ont profondément réformé le droit des successions en France, et notamment les droits du conjoint survivant. Auparavant relativement oublié lors du règlement des successions, le conjoint bénéficie désormais d'une réelle protection juridique lors du décès de l’être aimé.
En effet, préalablement à la réforme du droit des successions, en présence d’enfant le conjoint ne recueillait qu’un quart des biens dépendant de la succession en usufruit, ce qui était bien maigre et ne permettait souvent pas au survivant de se maintenir notamment dans les biens qui constituaient la résidence de la famille en cas de mésentente avec les autres héritiers.
Soucieux de réparer cette situation qu’il considérait injuste, le droit s’est réformé et a renforcé la protection accordée à votre conjoint en cas de décès.
Nous évoquerons tout d’abord les droits du survivant en l’absence de descendants du défunt, et dans un second temps nous présenterons ceux qui lui sont ouverts lorsque des enfants viennent à la succession. Enfin, nous évoquerons les droits du conjoint survivant sur le logement.
1 - Les droits du conjoint survivant en l’absence d’enfants ou de descendants
Les dernières réformes du droit des successions ont modifié l’ordre de succession en l’absence de descendants du défunt. En effet, le conjoint survivant prime désormais les frères et sœurs du défunt dans l’ordre de succession. Il convient toutefois de distinguer deux cas :
1°) Si le défunt laisse ses père et mère, alors le conjoint survivant recueillera la moitié de la succession, voire les trois quarts si le père ou la mère du défunt est également prédécédé.
2°) En l’absence de père et mère du défunt survivant, alors c’est toute la succession qui reviendra au survivant. La loi lui confrère même dans cette hypothèse un droit à réserve d’un quart des biens dépendant de la succession, ce qui veut dire que le conjoint ne peut pas être deshérité totalement par un testament, et recueillera au minimum un quart des biens du défunt.
Dans cette seconde hypothèse toutefois, on notera que les frères et sœurs du défunt ne sont pas totalement exclus puisque les biens que le défunt avait reçu par succession ou donation et qui n’auraient pas été vendus depuis, reviennent pour moitié aux frères et sœurs du défunt issus des mêmes ascendants. Il est toutefois possible de supprimer ce droit par testament ou dans une donation entre époux, n’hésitez pas à interroger votre Notaire à ce sujet.
Intéressons nous à présent à la protection, fortement accrue, du conjoint survivant en présence de descendants.
2 - Les droits du conjoint survivant en présence d’enfants ou de descendants
Dans cette seconde partie, il conviendra une nouvelle fois de faire une distinction selon diverses situations prévues par le droit.
En effet, la multiplication des familles recomposées et des nouvelles parentalités à poussé le législateur à envisager l’hypohèse où les enfants ou descendants du défunt ne seraient pas nés e son union avec son conjoint survivant.
Intéressons nous successivement à deux hypothèses :
1°) Les descendants sont tous nés de l’union du défunt et de son conjoint
Cette hypothèse « traditionnelle » pose moins de questions aux héritiers. En effet, les enfants héritant de leurs deux parents, il est plus facile de renforcer les droits du conjoint survivant, puisque la part que ce dernier recueille sera transmise à son décès à ses enfants.
La Loi prévoit donc dans cette configuration que le conjoint survivant bénéficie d’un choix, qui lui appartient à lui et à personne d’autre, entre :
- Hériter d’un quart des biens dépendant de la succession en PLEINE PROPRIETE
- Ou de choisir de bénéficier d’un droit en USUFRUIT sur la TOTALITE de la succession. Pour rappel, un usufruit permet de conserver les biens et d’en percevoir les fruits. Par exemple, le survivant pourra ainsi conserver le bien immobilier qui constituait la résidence de la famille et y résider sans que les enfants puissent réclamer leur part sur ce bien jusqu’à son décès. Il pourra également choisir seul de le louer et de percevoir les loyers qui lui reviendront sans avoir à les partager avec les enfants.
2°) Les descendants ne sont pas tous nés de l’union du défunt et de son conjoint
Dans ce second cas, la logique est différente. En effet, on peut imaginer que les enfants du défunt qui ne sont pas issus de son union avec son conjoint survivant souhaiteront bénéficier de leur part d’héritage immédiatement sans forcément avoir à attendre le décès du conjoint survivant.
Par ailleurs, la part que le conjoint survivant recueillera dans la succession sera, à son décès, transmise à ses propres héritiers, les enfants du défunt pouvant dès lors se sentir lésés.
La loi a donc, dans ce cas précis, supprimé le droit d’option ouvert au conjoint survivant, qui ne recueillera qu’un quart des biens dépendant de la succession, le reste étant immédiatement transmis aux enfants du défunt.
S’agissant par exemple du logement de la famille, le conjoint survivant et les descendants du défunt se trouveront donc en indivision avec la possibilité pour ces derniers de demander un partage immédiat et le versement de leur part.
Toutefois, cet exemple doit être tempéré puisque la Loi confère également désormais au survivant des deux époux des droits spécifiques sur les biens qui constituaient le logement de la famille lors du décès, ce que nous allons étudier à présent.
3 - Les droits au logement du conjoint survivant
La protection des droits au logement du conjoint survivant a été l’élément central des dernières réformes du droit des succession, dont l’objectif principal était de lutter contre des situations dans lesquelles le drame de devoir quitter un lieu de vie s’ajoutait à la douleur de la perte de l’être aimé.
Désormais le conjoint survivant est protégé de trois manières :
1°) Il bénéficie pendant une année à compter du décès d’un droit TEMPORAIRE au logement. Durant l’année suivant le décès, le conjoint peut rester dans le logement appartenant aux deux époux ou au défunt seul, gratuitement.
Si les deux époux étaient locataires, alors les loyers ou indemnité d’occupation lui sont remboursés par la succession pendant une année, au fur et à mesure de leur acquittement.
Ce droit ne peut être supprimé par quiconque.
2°) S’il en fait la demande dans l’année du décès, il peut également bénéficier d’un droit VIAGER au logement. A noter toutefois que ce droit devra être valorisé et sera déduit de la part du conjoint survivant dans la succession, sans que cela puisse excéder sa part.
Par exemple, en présence d’enfants non communs aux deux époux, imaginons que la valeur de ce droit viager excède le quart de la valeur des biens. Dans ce cas le conjoint survivant bénéficiera de son droit viager mais ne devra pas pour autant verser aux descendants du défunt une quelconque indemnité.
Dans le cas inverse, si la valeur de son droit au logement ne dépasse pas le quart, alors il pourra prétendre bénéficier de ses droits sur la différence.
A noter toutefois que, par testament notarié uniquement, ce droit peut être supprimé.
3°) En cas de partage des biens dépendant de la succession avec les héritiers, le conjoint survivant peut également demander l’attribution préférentielle du logement, c’est-à-dire que les héritiers ne peuvent lui refuser de « racheter » la totalité des biens constituant le logement de la famille, à charge pour le conjoint survivant de leur verser une compensation financière bien évidemment.
Ces droits, prévus par la Loi, peuvent être augmentés ou réduits au moyen de divers outils juridiques (avantages matrimoniaux, donations entre époux, testaments…). N’hésitez pas à consulter votre Notaire qui, après analyse de votre situation personnelle, pourra vous proposer des solutions permettant de réaliser vos souhaits.