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La protection du conjoint quand le bien n'est pas commun

Qui n’a jamais redouté d’un jour se retrouver tel le Colonel Chabert, dans le romain d’Honoré de Balzac, privé de son toit et de sa famille ? Cette crainte montre à quel point la préservation d’un lieu commun à la famille est importante. Et à cet égard, le Code civil, à travers une notion, le logement de la famille, permet d’assurer à chacun des époux et leurs enfants de conserver un toit.
Photo représentant le logement commun
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Qu’est-ce que le logement de la famille ?

Le logement de la famille est le lieu d’habitation où vivent effectivement les époux et leurs enfants, ainsi que les meubles destinés à l’usage et l’ornement de cette habitation. 

Partant de là, cela exclut les résidences secondaires d’agrément (type « maison de vacances »).

 

Comment la protection du logement de la famille est-elle assurée pendant le mariage ?

Afin de préserver l’intérêt de la famille, tous les actes pouvant conduire à priver la famille de son logement nécessitent le consentement des deux époux.

Cette protection est telle que ce double consentement s’impose :

  • Même si les époux ont conclu un contrat de mariage ;
  • Et même si la résidence principale appartient à un seul époux.

Parmi les actes nécessitant l’accord des deux époux, on pourra noter :

  • La vente ou la promesse de vente ;
  • La donation
  • L’apport en société
  • La mise en location du logement familial
  • La résiliation du contrat d'assurance garantissant le logement familial
  • La constitution d'une hypothèque conventionnelle.

 

Que faire si mon conjoint a passé un de ces actes sans mon accord ?

L’époux qui n’a pas donné son consentement à un acte nécessitant l’accord des deux époux peut en demander l’annulation devant le juge aux affaires familiales.

La demande doit intervenir dans un délai d’un an à compter du jour où l’époux a eu connaissance de l’acte.

 

Que faire si mon époux n’est pas en mesure ou refuse de donner son consentement ?

Si l’un des époux est hors d’état de manifester sa volonté (maladie, absence, etc), ou s’il refuse de donner son consentement, l’autre époux peut être autorisé par le juge à passer seul un acte si l’intérêt de la famille le commande.

 

Mon conjoint dispose d’un logement de fonction dans lequel vit la famille, que se passe-t-il s’il souhaite quitter son emploi ?

Lorsque le logement attribué au titre de l’activité professionnelle sert de résidence à la famille, il aura le caractère de logement de la famille. Ainsi, le conjoint, bénéficiaire du logement de fonction, ne pourra renoncer à son logement de fonction sans le consentement de son conjoint.

Toutefois, afin de préserver sa liberté d’exercice professionnel, l’époux qui souhaite quitter ses fonctions et perdra en conséquence le bénéfice de son logement de fonction pourra le faire sans le consentement de son conjoint.

 

Mon conjoint et moi vivons séparés, peut-il disposer du logement comme bon lui semble ?

Lorsque les époux ne résident pas au même endroit, le logement de la famille peut être identifié :

  • Soit comme étant le logement que le couple occupait avant la séparation ;
  • Soit par un faisceau d’indices (lieu de résidence des enfants, centres des intérêts patrimoniaux, etc...).

Même lorsque les époux vivent séparément, la protection du logement de la famille continue de s’appliquer, y compris lorsqu’il n’appartient qu’à un seul des époux.

 

Mon conjoint est seul propriétaire du logement de la famille, en cas de divorce, puis-je le conserver ?

Généralement, lorsqu’un seul des époux est propriétaire du logement de la famille, en cas de divorce, il souhaite le conserver à l’issue de la procédure.

A titre exceptionnel, le juge peut autoriser l’ex-conjoint à continuer d’habiter le logement de la famille en qualité de locataire. C’est notamment le cas lorsqu’il est dans l’intérêt des enfants du couple de continuer à vivre dans le logement (par exemple pour rester dans les mêmes établissements scolaires).

 

Nous sommes locataires mais seul mon conjoint a signé le bail, suis-je protégé ?

Afin de protéger les époux, la loi a créé un principe de cotitularité du bail. Ainsi, les époux sont tous les deux titulaires du bail du logement qu’ils occupent, même si un seul des époux a signé le bail (par exemple avant le mariage).

 

En cas de séparation, si nous sommes locataires, puis-je conserver mon logement ?

En cas de séparation, si un seul des époux donne congé au propriétaire afin de quitter le logement, l’autre époux reste titulaire du bail.

Toutefois, l’époux qui a donné congé reste solidairement obligé de payer le loyer et les charges du logement. Cette obligation ne prend fin que dans les cas suivants :

  • Soit à la fin du délai de préavis du congé donné par l'autre époux
  • Soit lorsque le divorce est retranscrit en marge de l'acte d'état civil

En cas de divorce ou de séparation de corps, la cotitularité cesse et le bail est attribué à l’un ou l’autre des époux en fonction de l’intérêt de la famille.

 

En cas de décès de mon conjoint, puis-je rester dans le logement de la famille ?

En cas de décès, la loi offre au conjoint survivant un droit de jouissance gratuit du logement et du mobilier le garnissant pendant une durée d’un an. Ce droit temporaire au logement s’applique :

  • Si le logement de la famille appartenait aux deux époux ;
  • Si le logement de la famille appartenait à un seul époux.

De plus, pendant un délai d’un an à compter du décès, le conjoint survivant peut demander à rester gratuitement, jusqu’à la fin de ses jours, dans le logement et à jouir du mobilier le garnissant. On parle alors de droit viager d’usage et d’habitation.

Toutefois, ce droit vient en déduction des droits du conjoint survivant dans la succession de son conjoint.

A noter que, lorsqu’il n’existe que des enfants communs dans une succession, le conjoint survivant peut bénéficier de l’usufruit de la succession, c’est-à-dire le droit de conserver l’usage et la jouissance de tous les biens jusqu’à la fin de ces jours. Dans ce cas, le droit viager d’usage et d’habitation est inclus dans les droits successoraux en usufruit du conjoint survivant.

 

Si nous sommes locataires, en cas de décès de mon conjoint, puis-je conserver le bail concernant le logement de la famille ?

En cas de location, le conjoint survivant bénéficie d’un droit à conserver le bail à son profit. Et le montant du loyer et des charges pour l’année suivant le décès, sera à la charge de la succession.